Iran, de nos jours. Un homme croise par hasard celui qu’il croit être son ancien tortionnaire. Mais face à ce père de famille qui nie farouchement avoir été son bourreau, le doute s’installe.
Entretien du réalisateur Jafar Panahi
Que s’est-il passé pour vous depuis Aucun Ours, votre film de 2022 ?
Comme cinéaste, je suis entré dans une nouvelle période.Depuis mes débuts avec Le Ballon Blanc en 1995 jusqu’à Hors Jeu, j’ai travaillé en me consacrant à mes problèmes de réalisateur. Il y avait des pressions bien sûr, mais je pouvais me concentrer sur les solutions concernant mes films. Après ma première arrestation en 2010, et la condamnation qui m’interdisait de filmer et de voyager, je me suis focalisé sur ma propre situation. Alors qu’avant ma caméra était tournée vers l’exterieur, à partir de ce moment elle a été tournée vers l’intérieur, vers ce que je vivais, et qui se traduit par ce que j’ai réalisé, de Ceci n’est pas un filmà Aucun Ours. Mais à présent que ces restrictions ont été levées, j’ai senti que je devais m’en retourner vers l’extérieur, mais d’une manière nouvelle, marquée par l’experience de toutes ces années, et aussi par mon deuxième séjour en prison, de juillet 2022 à février 2023.
Un Simple Accident place le régime iranien face à ses faiblesses et ses peurs, il se voit tel qu’il est et cette vision d’horreur lui est insupportable. Cette réalité le dérange, il n’existe aucun issue à la mémoire des coups reçus sous la torture, les victimes gardent en eux chaque détail, chaque odeur, chaque son,jusqu’au jugement dernier qui n’est jamais la même pour tous.
Alors que le tortionnaire se voit embarqué, il tente le tout pour se tirer d’affaire, mais cette fois il est seul, vulnérable, bien loin de ses barbares de protecteurs. Il comprend très vite ce qu’il l’attend, sa conscience se réveille enfin…, des années à infliger des pires blessures à des innocents, a-t-il encore une chance de s’en sortir ?
En visionnant ce chef-d’œuvre de Jafar Panhai, j’ai vu une métaphore d’un procès, celui du peuple qui juge ses bourreaux, chacun exprime ses propres souffrances en prison, les souvenirs se côtoient dans les salles obscures imbibées de sang des innocents qui un jour se sont levés contre l’obscurantisme.
Les mots sont forts, symboliquement marquants, les regards sont encore perdus dans le néant de la répression, mais l’espoir veille sur eux, il n’est pas loin, car à la fin de n’importe quel combat, la liberté et l’humanité gagne toujours, il suffit de suivre la flamme qui mène à la victoire.
Une fois de plus le cinéma iranien donne la parole à la femme iranienne, signe que depuis la révolution Femme Vie Liberté, elles sont au premier plan du combat de la société iranienne au bord du chaos.
Le génie Panahi offre à ses compatriotes la reconnaissance des difficultés qu’ils endurent, il envoie un message fort à ses compagnons de prison, cela sonne comme un rappel d’une promesse… en disant ,vous voyez je ne vous oublie pas !
Il les embarquent aux Oscars 2026, une magnifique revanche, après la palme d’or Cannes 2025.
Vive le cinéma iranien encore et toujours.
Informations Pratiques :
Titre : Un Simple Accident
De : Jafar Panahi
Avec : Vahid Mobasseri,Maryam Afshari, Ebrahim Aziza
Genre : Drame
Durée : 1h42
Distributeur : Mémento
Prix : Palme d’or 2025
Date de sortie au cinéma : 1er octobre 2025
Mitra Etemad

