Librairie : Charlotte de David Foenkinos

Ce roman, sorti en 2014, qui a obtenu le Prix Goncourt des Lycéens et le Prix Renaudot, m’intriguait mais je n’étais pas certaine d’aimer le sujet traité. J’ai envie de lecture légère et optimiste en ce moment, il ne répond pas à ces critères. Mais lorsque je l’ai trouvé à 3 euros lors d’un vide-grenier, j’ai décidé de m’en faire un avis.charlotte_david_foenkinos

Ce roman est surprenant puisque David Foenkinos va à la ligne à la fin de chaque phrase. Il explique qu’il avait besoin de respirer pour livrer cette histoire qui le fascine depuis des années. Les mauvaise langues diront que c’est afin d’écrire plus de pages, mais le style pur et ciselé, la sensibilité et la finesse inhérentes à ses phrases démentent les propos des médisants.

Le roman retrace la vie de Charlotte Salomon, artiste peintre morte dans un camp de concentration à l’âge de 26 ans, alors qu’elle était enceinte.

Dès sa naissance, le destin tragique de Charlotte est écrit. En témoigne l’incipit :

Charlotte a appris à lire son prénom sur une tombe.

Elle n’est donc pas la première Charlotte.

Il y eut d’abord sa tante, la soeur de sa mère.

Les deux soeurs sont très unies, jusqu’au soir de novembre 1913.

Franziska et Charlotte chantent ensemble, dansent, rient aussi.

Ce n’est jamais extravagant.

Il y a une pudeur dans leur exercice du bonheur.

C’est peut-être lié à la personnalité de leur père.

Un intellectuel rigide, amateur d’art et d’antiquités.

A ses yeux, rien n’a davantage d’intérêt qu’une poussière romaine.

Leur mère est plus douce.

Mais d’une douceur qui confine à la tristesse.

Sa vie a été une succession de drames.

Il sera bien utile de les énoncer plus tard.

Pour l’instant, restons avec Charlotte.

La première Charlotte.

Elle est belle, avec de longs cheveux noirs comme des promesses.

C’est par la lenteur que tout commence.

Progressivement, elle fait tout plus lentement : manger, marcher, lire.

Quelque chose ralentit en elle.

Sûrement une infiltration de la mélancolie dans son corps.

Une mélancolie ravageuse, dont on ne revient pas.

Le bonheur devient une île dans le passé, inaccessible »

Un soir de novembre, elle se jettera d’un pont. Sa soeur, lorsqu’elle met au monde une petite fille quelques mois plus tard, décide d’appeler le bébé Charlotte car « C’est une façon de la faire vivre encore « .

Franziska, la mère de Charlotte Salomon, sombre dans une folie douce. Elle veut rejoindre sa soeur :

Souvent, elle raconte à Charlotte qu’au ciel tout est plus beau.

Et ajoute : quand j’y serai, je t’enverrai une lettre pour te raconter.

L’au-delà devient une obsession.

Tu ne veux pas que maman devienne un ange ?

Ce serait prodigieux, n’est-ce pas ?

Charlotte se tait.

Franziska se défenestre. La petite Charlotte, elle, attend pendant des heures, assise sur le rebord de sa fenêtre, que sa mère lui envoie des nouvelles…

Charlotte grandit en silence, rencontre un homme et tombe amoureuse. Mais l’antisémitisme grandissant menace toute sa famille.

David Foenkinos ne se complait pas dans l’énumération des drames familiaux, il met en avant l’aura de Charlotte Salomon et son talent artistique indéniable.

J’ai trouvé ce roman magnifique, touchant, sincère. J’avais moi aussi besoin de respirer à chaque phrase, cela permettait aussi d’apprécier la beauté de certaines :

Certains physiques ressemblent à une question sans réponse.

Au sujet d’Alfred, l’homme dont Charlotte s’éprend, dont on ne peut dire s’il est beau ou laid.

Elle l’observe avec cette curiosité facile pour ce qui nous parait loin.

Au sujet du monde dans lequel elle évolue, qu’elle découvre seulement.

Le présent commence à prendre la forme du toujours.

David Foenkinos évoque ici le nazisme omniprésent.

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